Depuis l'an 1000, une activité minière existe à St. Marie aux Mines et sa vallée. Lors de "la ruée vers l'argent" du 16ème siècle avec l'arrivé de 3000 mineurs, le village de 400 habitants est soudainement devenu la troisième ville de la région, après Strasbourg et Colmar.
A l'origine, les mines étaient creusées verticalement, créant ainsi des puits verticaux qui, malheureusement, avaient la faiblesse de laisser l'eau s'infiltrer et de devoir l'enlever péniblement à l'aide de seaux. Une nouvelle technique consistant à creuser des galeries horizontales s'impose ensuite définitivement. Ces galeries étaient creusées par deux hommes en position assise. Le premier avait la responsabilité de suivre le filon de minerai et de ne pas le perdre, tandis que le deuxième était responsable que la galerie soit en légère pente permettant ainsi d'évacuer naturellement l'eau qui s'infiltrait.
Les minéraux contenus dans le filon sont du minerai, substance utile, et la gangue, substance stérile. Le minerai est composé d'argent, cuivre, arsenic, cobalt, plomb et des métaux sans intérêt économique, comme le zinc, fer, manganèse, nickel, antimoine, bismuth et d'autres encore sous forme de trace, car on en ignorait l'usage à cette époque. Les substances comme le quartz, barytine, fluorite, calcite dolomite, carbonate de fer etc. constituaient la gangue.
Ce sont les roches métamorphiques, à savoir le gneiss, qui hébergent la totalité des filons à St. Marie aux Mines. Il était inutile de chercher dans les granites avoisinants.
Le profil des galeries est un bon indicateur de la richesse du filon. S'il est étroit et régulier, on suivait le filon de minerai qui variait entre un et plusieurs centimètres de largueur. Par contre, dès que le profil s'ouvre et prend de la largeur, un endroit rentable a été trouvé et exploité.
Les mineurs avançaient entre 10 à 20 centimètres par jour. Les mois ou les années pauvres, deux mineurs travaillaient dans la galerie en suivant le filon, avec l'espérance de trouver une poche de minerai plus importante. Dans ce cas, l'entrepreneur engageait des mineurs supplémentaires en fonction de la place disponible dans la galerie. A la seule force de leurs bras, ils ont sculpté plus de 300 km de galeries souterraines.
Un système de rails avec chariot étroit, d'environ 20 cm de large entre 50 et 60 cm de haut, permettait de sortir le minerai, la matière stérile et la roche.
L'aération de la mine est essentielle ainsi un système ingénieux a été inventé. Environ 20 cm sous le plafond un faux plafond en bois était installé et de l'argile servait à assurer l'étanchéité. Un puits d'aération près de l'entrée et une faible différence de niveau avec l'entrée de la mine, suffisait à produire un tirage comparable à une cheminée. Le faux plafond servait, quant à lui, de caisson de ventilation, permettant de canaliser l'air vers le fonds de la galerie. En hiver, l'air froid entrait dans la galerie et se réchauffait avec la température ambiante du sous-sol qui est constant tout au long de l'année à environ 8 degrés. L'air ainsi chauffé devenait plus léger et sortait par le faux plafond vers l'extérieur. En été, le courant s'inversait et alimentait la galerie.
Le Seigneur de Ribeaupierre et le Duc de Lorraine vendaient les concessions aux investisseurs pour exploiter les mines. En plus des concessions, les sociétés minières payaient un impôt de 10% sur la production. Les mineurs étaient des salariés payés chaque semaine, pour un travail journalier de 8 heures. L'âge minimum pour travailler dans la mine était entre 14 et 15 ans. Les mineurs organisaient et alimentaient une caisse d'assurance "Knappschaftskasse" qui attribuait des prêts remboursables dans les cas d'accident ou de maladie d'un mineur, mais payait aussi le salaire du pasteur et l'éducation des enfants !
L'activité minière connaissait des hauts et des bas. La découverte des mines d'argent, au Brésil, qui produisaient à moindre frais, a profondément touché l'industrie à St. Marie aux Mines. Une dernière hausse d'activité imputable à l'invention de la poudre noire, le dynamite, se produisit au 18ème siècle à St. Marie aux Mines. La dernière mine d'argent cesse son exploitation en 1904 et la dernière mine d'arsenic en 1940.
Sur la centaine de galeries abandonnées, une dizaine de mines ont été re-ouvertes et sécurisées pour accueillir les visiteurs et leur offrir un voyage dans le temps.
En visitant l'une de ces mines, l'expo Euro-Minéral à St. Marie aux Mines prend tout à coup une autre allure et on imagine mieux les conditions de travail des mineurs d'autrefois. Mais le passé n'est pas si lointain et ces anciennes techniques minières ne sont pas prêtes d'être révolues. En effet, les mines en Birmanie, à Madagascar et dans d'autres pays en développement fonctionnent encore aujourd'hui selon ces techniques. On regrettera simplement que l'organisation sociale autour de ces nouvelles exploitations ne se soit pas aussi bien développée qu'au 16ème siècle à St. Marie aux Mines.
Hubert Heldner août 2004
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